Friday, June 08, 2007

Bonheur d'avant

Avant, le soleil tiède emplissait le chambre de mes rêves. Avant, le soleil s'inversait, naissant à l'occident. Je me contentais d'imaginer de fantastiques histoires. L'irréalité me satisfaisait pleinement. Je voyais la Terre tourner. J'aimais les vertiges; je m'allongeais; il suffisait que je ferme les yeux quelques secondes pour que toutes les images défilent. Il fallait fermer les yeux, oui. Je m'amusais; les images s'enchaînaient de manière incohérente; mon corps brûlait, j'avais toujours soif. Je rouvrais les yeux, j'étais comme abruti, le sourire aux lèvres. On me prenait pour un imbécile. Je jouissais. Je croyais en moi. Je courais, courais tant et si bien que j'avais mal. Mais la douleur n'avait pas plus d'existence que le monde qui m'entourait. Il me semble même que parfois je pleurais de joie. Mais cela ne doit être pas vrai. Pleurer de joie! Je n'étais pas encore ridicule à cette époque-là. Voilà que le miroir commence à se déformer, encore une fois, comme il y a cinquante ans. Je m'en souviens très bien. Je commençais déjà à vieillir. Je faisais le bilan de ma vie. Signe particulier: néant. J'avale mes flammes, je croque mes haines. Je parcours d'autres chemins; la fatigue m'envahit; les rêves se sont échoués sur la grève désolée où tombe une pluie fine et sans fin. Au fond, il n'est rien de plus beau que les lieux déserts.

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