Sunday, October 15, 2006

Tombeau du poète

Par les sentiers abrupts où les fauves s'engagent,
Sur un pic ébloui qui monte en geyser d'or,
Compagnon fabuleux de l'aigle et du condor,
Le Poète nourrit sa tristesse sauvage.

A ses pieds, confondus dans un double servage,
Multipliant sans cesse un formidable effort,
Les Hommes, par instants, diffamaient son essor:
Mais lui voyait au loin s'allumer les rivages.

Et nativement sourd à l'injure démente,
Assuré de savoir à quelle ivre Bacchante
Sera livrée un jour sa dépouille meurtrie;

Laissant la foule aux liens d'un opaque sommeil,
Pour découvrir enfin l'azur de sa patrie
Il reprit le chemin blasphémé du soleil!

(Léon Deubel, 1879-1913)

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