Saturday, December 16, 2006

Passion

Tout se passe comme si je regardais un film dans lequel je me trouvais. Comme si je n'avais plus à mettre un pied devant l'autre pour avancer. La sensation est inédite. Mais tout ce que je vois devant moi est tragique. Je ne peux tourner le dos à la vie cruelle; elle m'enveloppe comme un manteau brûlant. Je n'ai pourtant jamais ressenti une telle joie. Je ressemble à un enfant paniqué par un jeu encore incompréhensible pour lui. Je murmure des mots de plus en plus longs, un éloge de la vie. Je sais très bien que cela ne va pas durer. Je vais dans quelques secondes rentré au bercail et c'en sera fini. La mare de sang, face à moi, n'a aucune raison de ne pas grossir. Elle ne me noiera pas. Je suis d'un autre espace, d'un autre temps. Je n'ai pas envie de mourir et, pour cela, je ne mourrai pas. Bien sûr, la sang devient noir, maintenant. Il ne pouvait rester longtemps rouge vif. Je continue d'avancer sur un tapis roulant invisible, -une sorte d'idée. Mon idée. L'idée générale. Non, je ne suis pas le jouet d'une illusion. Tout existe. Les autres, là-bas, qui continuent de souffrir (ventres ouverts, crânes défoncés, jambes broyées) s'estompent. L'image devient flou. Voilà, je tombe sur les genoux. Je pousse un cri. On me relève. J'insulte le sale humaniste qui m'est venu en aide. Et je mets un pied devant l'autre. Je marche vers le pays du non-sens.

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