Il semble, comme le disait Paul Léautaud dans ses entretiens avec Robert Mallet, que la poésie française se soit arrêtée à la mort de Guillaume Apollinaire, en 1918, une semaine avant l'armistice. J'avoue avoir bien du mal à considérer les textes qu'on écrivit par la suite comme de la poésie. Oui, voir les textes de Paul Eluard comme des poésies est pour moi une infamie. "La terre est bleue comme une orange " est pour moi le plus mauvais vers de tous les temps et ce ne sont pas les exégèses des commentateurs qui vont m'impressionner. La poésie surréaliste fut un produit fabriqué. Aucune spontanéité, aucun vrai travail sur les mots, en un mot aucune poésie. Le pire poète fut, à mon sens, André Breton, le dictateur aux textes ridicules, comme L'Union libre, pour donner un exemple fameux. J'ajouterai qu'il récitait très mal. Mais je ne vais pas l'accabler davantage. Il n'était pas le seul dont les textes me hérissent. Beaucoup sont impressionnés par l'oeuvre de René Char, l'Héraclite fumeux. Il est vrai que plus un texte est ardu, plus il est riche, profond, comme disait un jour le faux écrivain Bernard-Henri Lévy, à propos des deux Jacques, je crois: Derrida et Lacan. Même moi, quand j'étais adolescent, je croyais à la profondeur des textes obscurs. J'essayais de comprendre Mallarmé. J'ai renoncé très vite. Mais je ne critiquerai pas ce poète qui était cent fois moins malhonnête que les surréalistes qui ont réussi leur pari: rendre la poésie illisible.
Je n'ai pas fini. Je dois avoir quelque part dans ma bibliothèque en désordre un exemplaire de L'Homme approximatif de Tristan Tzara. Je n'en ai lu qu'une page, il y a une quinzaine d'années. Qui pourrait prétendre sans mentir avoir lu ce non-texte jusqu'au bout? Ce qui me renverse le plus, ce sont les "devanciers" que s'étaient trouvés les surréalistes: Charles Baudelaire, par exemple, qui, lui, était un classique avant tout. Lautréamont, que je trouve un peu surfait. Et surtout Rimbaud, "le mystique à l'état sauvage", comme le surnommait le pesant Claudel; Rimbaud dont, pour moi, ne sont lisibles que les premières poésies et Vers nouveaux.
J'avoue tout de même avoir une certaine tendresse pour ce dormeur éveillé qu'était Robert Desnos. Mais, je l'affirme, la poésie surréaliste, la poésie française du XXème siècle a été un échec total. Je ne parlerai pas d'Yves Bonnefoy ou Guillevic. Certains doivent y trouver leur compte, comme on dit. Peut-être des poèmes constitués d'un seul mot ont-ils été écrits. Je ne sais pas. Il faudrait que je fasse des recherches là-dessus.
Cela peut paraître idiot mais j'aime comprendre tout de suite ce que je lis. Quand je ne comprends pas, je suis agacé et je me pose des questions sur la moralité de l'auteur.
"Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement
Et les mots pour le dire arrivent aisément. "
La prochaine fois, je règlerai son compte à Jacques Prévert, qui, c'est vrai, était un con, pour reprendre le mot employé par Michel Houellebecq.
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